24 déc. 2009

Noël en été

Voici juste quelques mots pour vous souhaiter à tous un très joyeux Noël. Pour la deuxième fois consécutive, j’ai le privilège de passer cette fête en été. Je vous laisse imaginer lequel de ces deux 25 décembre aura été le plus chaud…
Etre loin des siens pendant les fêtes donne toujours un petit pincement de cœur… Mais le bonheur d’être ici justifie à lui-seul tous ces sacrifices.
Entre icebergs et manchots, dans cette immensité gelée, je me sens plus que jamais à ma place.
Après quelques jours d'un temps moyen, le soleil est revenu, et ses reflets sur la mer sont magnifiques. Les Adélie profitent allègrement de l'eau libre qui entoure maintenant l'île. Cela donnerait presque envie de s'y baigner !
De mon petit bout de caillou je pense bien fort à vous tous et vous souhaite de belles fêtes de fin d’année !


19 déc. 2009

D-Day !

Que de choses à raconter depuis la dernière fois…

Tout d’abord, ça a été l’effervescence depuis l’arrivée de R1. Vendredi 11 décembre, tous les passagers de l’Astrolabe ont débarqué après un vol en hélicoptère d’une demi-heure. La TA 60 est donc quasiment au complet ! Ne manquent que notre lidar, et notre sismo-magn, qui arrivent sur R2. Je dois avouer que c’est avec une certaine émotion que j’ai vu mes camarades arriver. Nous ne nous étions croisés que quelques jours à Brest, et avions échangé quelques e-mails, mais déjà il était clair dans ma tête que nous formions une équipe. Je suis maintenant dans la même chambre que Sophie, une autre hivernante vétérinaire, qui a fait ses études en Espagne. Dès leur arrivée, nous avons avec Marie amené nos collègues à la manchotière, pour qu’ils rencontrent les empereurs… Ils n’ont visiblement pas été déçus par cette belle balade ! Je me revois il y a quelques semaines, découvrant avec émerveillement toutes les particularités locales.


Devant le séjour, notre banderole d'accueil

La base s’est donc bien remplie, cela grouille de monde ! Ajoutons à cela le retour du raid 1 le samedi 12 décembre, et l’arrivée de 2 avions de Terra Nova Bay nous déposant des anciens hivernants de Concordia, français et italiens. Encore de nouvelles têtes et de belles rencontres. Un ancien hivernant de Concordia, astronome, nous a fait une présentation sur le ciel de Concordia et la vie à la base. A côté de leurs -70°C et leur réelle nuit polaire, les conditions de vie à DDU semblent tropicales !

L’hélicoptère a sans arrêt effectué des allers-retours jusqu’au bateau pour décharger l’indispensable, dont ne font bien évidemment pas partie nos cantines. Nous ne les aurons donc qu’à R2, fin décembre.

L’autre évènement de cette semaine est l’arrivée des poussins Adélie ! Marion a vu le tout premier poussin le 15 décembre. Comme il ne faisait pas très beau ces derniers jours, avec beaucoup de vent, les Adélie étaient souvent couchés, et nous entendions les poussins sans les voir… J’ai donc du attendre le jeudi 17 décembre pour voir mon premier poussin Adélie ! Ils sont mignons comme tout, recouverts de duvet gris. Ils essaient en rampant de sortir de sous leur mère, mais elle les en empêche avec son bec. Rares sont les Adélie qui ont déjà 2 poussins, la plupart ont 1 poussin et 1 œuf, qui devrait éclore dans les jours à venir.


Femelle Adélie surveillant son poussin


Poussin Adélie

Et enfin, l’évènement du vendredi 18 décembre (et je vois que les nouvelles vont vite…) est l’arrivée à DDU de l’hélicoptère du Sea Shepherd. Pour ceux qui ne connaissent pas ce bateau, il s’agit d’un navire dirigé par Watson, un ancien de Green Peace, qui lutte contre le trafic de baleines en pourchassant les baleiniers, leur arme principale étant la médiatisation (41 personnes à bord dont 10 journalistes). Leur bateau est tout noir, nous l’avions vu à quai lorsque nous étions à Hobart. Il y a quelques jours, le Sea Shepherd a appelé notre DisTA pour lui demander s’il pouvait se réfugier dans les eaux territoriales françaises, car il était poursuivi par un baleinier japonais. Cela n’a pas ralenti le baleinier, qui a continué de les pourchasser, et a tenté d’empêcher leur hélicoptère de se poser en l’arrosant à la lance à incendie… Leur hélicoptère est donc venu se mettre hors de portée pendant quelques heures à DDU, pour notre plus grand plaisir à tous. Le pilote et le passager ont été tout de suite assaillis de questions, et y ont répondu avec beaucoup de patience. Ce genre d’évènement, qui brise la routine, met tout de suite un peu d’animation dans la base !


L’hélicoptère du Sea Sheperd se posant derrière le bâtiment météo

Voilà, à côté de cela, la fonte de la banquise se poursuit, la débâcle ne devrait peut-être plus tarder… La banquise devient de moins en moins sûre, les périmètres de sécurité ont donc été diminués après quelques bains inopinés. Il va falloir se passer de balades pendant quelques mois… En revanche, cela nous offre de magnifiques paysages, où Adélie et empereurs sautent dans l’eau, sur fond d’icebergs…


Les zones d’eau remplacent progressivement la banquise


Paysage de début de journée

Depuis le 5 décembre, le soleil ne se couche plus. La calotte de glace du continent nous donne pendant un peu plus de 2 h la sensation qu’il se couche (il passe derrière le continent), mais il fait jour de façon permanente. C’est étrange de voir l’influence que le soleil peut avoir sur notre rythme de vie, car j’ai besoin de beaucoup moins de sommeil, et me lève sans problème tôt le matin.


Vue sur la colonie de Biomar

Voilà, niveau travail, les manips étant lancées, on continue nos suivis de manchots, en les espaçant un peu. Le travail est donc un peu routinier. Cela m’a donné l’occasion d’accompagner les ornitho lors de certaines manips. J’ai ainsi goûté au vomi de pétrel des neiges lors d'un contrôle de ponte, et je m’en serai bien passée… En effet, lorsqu’ils se sentent en danger, ils crachent sur l’intrus un liquide visqueux et nauséabond, dont l’odeur est particulièrement persistante.

Chez vous Noël approche, j’imagine les supermarchés bondés, les décorations, la course aux cadeaux et le tapage publicitaire accompagnant tout cela… Ici nous sommes à des années lumières de cette frénésie, la base vit au rythme des rotations de bateau et d’avion, voilà ce qui symbolise l’avancement du temps.

Pour finir, quelques nouvelles des punks, qui commencent à prendre un joli plumage d’adulte. Les adultes sont de plus en plus nombreux à déserter la manchotière, laissant les jeunes se débrouiller seuls. Bientôt, eux aussi partiront !


Poussins empereurs en cours de mue. Attention il y a quelques intrus sur la photo…


Jeunes empereurs quittant la colonie en colonne

11 déc. 2009

Bye bye la banquise !

Alors je vous avais laissé avec les manchots Adélie… Avant de parler des autres animaux présents sur l’île en été, laissez-moi vous parler de leurs voisins les hommes. L’Astrolabe est à moins de 100 km de la base et risque de ne pas pouvoir approcher d’avantage à cette rotation (R1). Les passagers vont donc être descendus par hélicoptère aujourd’hui, et la population de la base va quasiment doubler. D’après ce que nous ont dit les « anciens », le rythme va complètement changer. 5 hivernants de la 59 vont partir, et 21 hivernants de la 60 arrivent. Notre mission va donc devenir majoritaire, et si comme beaucoup nous redoutons l’augmentation d’activité de la base, il nous tarde également d’accueillir nos camarades et de partager avec eux nos premières impressions. Nous avons eu l’occasion de communiquer par mail avec 2 de nos futurs météo, la traversée a été difficile… Le bateau a quitté Hobart dans le mauvais temps et un vent force 9. Forcément, beaucoup ont été malades, et après un court répit le mauvais temps a repris… Hier les premiers hélicoptères nous ont amené le courrier, puis notre DisTA (chef de district) Marie-France, et notre cuisto Gurvan. Le midi au repas, c’était un peu la fête d’accueillir de nouvelles têtes ! Ce matin, nous avons aux aurores (enfin, façon de parler, parce que l’aurore en ce moment est quelque chose de plutôt virtuel) accroché une banderole devant la piste d’atterrissage de l’hélicoptère : « WELCOME HOME TA60 ».


Avec Marion et Marie devant Biomar

Sinon l’évènement de ces derniers jours est le début de la débâcle. Après une journée de mauvais temps la semaine dernière, une zone d’eau libre est apparue. Nous hésitions tout d’abord : était-ce réellement de l’eau libre, ou alors y avait-il une couche de glace sous une fine pellicule d’eau ? Rapidement la tendance s’est confirmée, la zone d’eau s’étendant de plus en plus et les bergs se mettant à bouger… En quelques jours, le paysage a été complètement modifié. Désormais, les zones de balades sont très restreintes, notre territoire de jeu se réduit de plus en plus.


Panorama pris derrière le 42 (dortoir). A peu de choses près c’est la vue que j’ai quand je me brosse les dents !


Paysage au bout de la piste du lion

Pour rester dans la météo, nous avons arrosé la semaine dernière un nouveau record : la première fois qu’il n’y a pas un seul jour de neige en novembre ! C’est François, le chef météo, qui a payé le champagne. Le lendemain 1er décembre, il neigeait… Ouf, on a failli rater le record !

En ce qui concerne les loisirs, beaucoup de choses à fêter ces derniers temps. Il y a eu la pendaison de crémaillère du dortoir été, entièrement refait à neuf cet hiver. Du beau boulot ! Nous avons également eu le droit à une soirée italienne, avec pizzas/pâtes et desserts à la carte, comme au restaurant ! Et puis comme ici aussi c’est la France, nous avons eu un discours officiel du DisTA pour la journée de commémoration du 5 décembre. Sinon l’équipe de Biomar ayant procédé à un déneigement de la terrasse, nous avons organisé hier soir un apéritif sur notre terrasse pour fêter ce gros boulot ! Chaque bureau a maintenant une vue magnifique sur la banquise (enfin, sur la mer…), à la place des congères qu’il y avait avant. Et la pause café sur la terrasse devient très sympathique… L’apéritif quand à lui a vite dégénéré en bataille de boules de neige… Les balades ont également été fréquentes ces derniers soirs, pour profiter de la banquise tant qu’il en est encore temps…


Après le boulot, la balade du soir (photo Marie)

Sinon pour répondre à la question de Claire concernant l’approvisionnement en eau et en énergie à DDU, l’eau de boisson et de lavage est de l’eau de mer dessalée par un bouilleur. L’énergie de la base est fournie par un groupe diesel. La base dispose en fait de 3 moteurs situés à la centrale, ainsi que d’un moteur de secours localisé dans un bâtiment différent (secours en cas d’incendie). Chaque moteur fourni 140 KW, mais un seul tourne, les autres ne fonctionnent que pendant l’entretien du premier, où s’il y a un problème. Il y a 24h/24 quelqu’un qui surveille le bon fonctionnement de la centrale. Le carburant est amené par bateau pendant l’été, et il y a suffisamment de stock pour tenir plusieurs années… En été, il faut surveiller la consommation d’eau pour ne pas dépasser les capacités de production. Et pour éviter que tout ne gèle, il y a un système de circulation de saumure au niveau des tuyaux d’évacuation d’eau. Voilà pour l’essentiel ! J’aurai l’occasion de préciser certains points par la suite…

Pour revenir un peu aux animaux, en Guyane je m’étais extasiée devant les traces que font les tortues luths dans le sable, quand elles gagnent la mer. Eh bien quelle ne fut pas ma surprise de découvrir ici la même chose… pour les manchots empereurs dans la neige !


Traces de tortue luth en Guyane


Traces d’un manchot empereur se déplaçant sur la banquise : la large trace du milieu correspond à son ventre, et les petites marques du côté aux ailerons sur lesquels il pousse pour avancer !

Voici également une photo d’un poussin empereur en pleine mue. Ils ont tous des têtes de punk, c’est à mourir de rire !


Poussin empereur en mue

Pour finir, voici la note humoristique de Cath. Cherchez l’intrus :)…



Je vous laisse, j’entends un hélico qui arrive, il faut aller aider à décharger…