31 août 2010

Sous la neige !

Dernièrement nous avons subi de fortes chutes de neige. En quelques jours, il en est tombé plusieurs dizaines de cm, et certaines congères ont grossi de plusieurs mètres. C’est impressionnant ! Pour l’occasion, une corde a été tendue afin de sécuriser le passage entre le dortoir et le séjour. Au plus fort du mauvais temps, elle est loin d’être inutile !

Lors de chaque accalmie, les passerelles sont déneigées au mieux, et des marches sont taillées dans les congères, mais quelques heures de neige ou de vent suffisent pour devoir tout recommencer…

Vue sur le séjour de ma chambre, on observe une des cordes tendues pour traverser la congère

Vue sur les bergs un jour de catabatique

Les (rares) jours de beau temps, nous profitons toujours de la banquise, avec l’aide de raquettes. Sans raquettes nous nous enfonçons parfois jusqu’à mi-cuisse, ce qui est épuisant... Le vent et les marées créent de très jolies formations de glace sur la banquise, des vaguelettes au véritable chaos de glace…

Vaguelettes sur la banquise

Chaos de glace à proximité du glacier

Un des gigantesques bergs présents à proximité du glacier

Les poussins continuent de grandir. Il ne reste désormais plus d’œuf, et depuis quelques jours, nous observons les premiers émancipés thermiques.

Ces poussins ne sont plus dépendants thermiquement de leurs parents et arrivent donc à se protéger du froid tout seuls. Ils gambadent dans la colonie, avec leurs parents qui les suivent en les surveillant… Ils sont vraiment drôles. Parfois l’un d’eux se retrouve perdu au milieu de tous les manchots, alors il s’arrête et chante pour appeler son parent, les autres manchots lui donnant des coups de bec. Quand le mauvais temps arrive, ils se précipitent en général vers leur parent pour y chercher de la chaleur… Indépendants, indépendants… quand ça les arrange !

La manchotière devant le berg à « tête de bête »

Couple et son poussin

Poussin réclamant à manger

Bien au chaud dans la poche incubatrice !

Détail du ventre d’un empereur

Traces d’empereurs dans la neige



Voilà, sinon j’avais oublié de vous en parler, mais nous n’avons rien gagné au concours de films antarctiques. Nous étions un peu déçus, mais ça n’est pas grave, l’essentiel est que nous nous sommes beaucoup amusés !

Les activités restent nombreuses pour animer le quotidien : la 200e émission de Skuarock, un nouveau concours photo, des jeux, la préparation des vacances, les cours d’écologie… R0 arrive dans maintenant moins de deux mois, le temps semble nous filer entre les mains, comme du sable que l’on essaie de retenir…


Idée reçue n° 11 : pour travailler en Antarctique, il ne faut pas être frileux.

Eh non, c’est encore faux ! Il est tout à fait possible d’être frileux, d’habiter sur la côte antarctique, et de néanmoins ne pas souffrir du froid… J’en suis un des nombreux exemples : frileuse à la base, et encore davantage depuis mon année à la Réunion… Pourtant rares sont les moments où j’ai eu froid ici ! La raison à cela ? Des vêtements performants, des intérieurs très bien chauffés, et un peu de bon sens…

En effet, le paquetage fourni par l’IPEV est bien adapté aux conditions de vent et de températures de DDU. La plupart des vêtements sont lourds et encombrants, mais très chauds. Pour information, mon paquetage contenait les éléments suivants :
-Une veste épaisse baptisée « VTN » : très lourde, mais chaude et coupe-vent. C’est la veste de tous les jours. Il en existe plusieurs coloris, pour éviter qu’on ne les confonde trop… On reconnait les gens de loin à leurs couleurs de VTN !
-Un « pantalon de VTN », qui va avec la veste du même nom, chaud et coupe-vent également ;
-Une combinaison bleue en duvet pour les biologistes, incroyablement chaude ! J’en suis complètement fan…
-Une vareuse coupe-vent et son pantalon associé, orange fluo : les « VTN oranges ». Surtout utilisés pendant la campagne d’été car non doublés et non imperméables ;
-Plusieurs « chemises IPEV » : pour ressembler à un bûcheron. Elles sont paraît-il chaudes et agréables à porter, mais beaucoup ne les mettent jamais ;
-Plusieurs « jeans IPEV » : pas très seyants, mais pratiques pour travailler ;
-Un gros pull en général trop grand ;
-Une polaire épaisse ;
-Plusieurs « Helly Hansen » : sous-pulls et sous-pantalons thermiques, très chauds mais non respirants ;
-Une paire de bottes chaudes confortables baptisées « Sorrell » ;
-Une paire de bottes « grands froids » pour les biologistes : lourdes et encombrantes, mais terriblement chaudes !
-Une paire de chaussures de sécurité, les « Bakou », glissantes sur les passerelles ;
-Plusieurs paires de grosses chaussettes très chaudes ;
-Une paire de « moufles trois doigts » : très chaudes, elles laissent le pouce et l’index libres, utiles pour faire de la photo ;
-Plusieurs paires de gants de travail plus ou moins chauds ;
-Des sous-gants en laine, une cagoule polaire, un tour du cou polaire, deux bonnets partiellement Windstopper ;
-Une paire de lunettes de glacier « Loubsol », pour ressembler à un aviateur…
-Un masque de ski à visière teintée ;
-Un tube de crème solaire
Le personnel technique reçoit en plus des bleus de travail, et le cuisinier et le boulanger des vêtements de cuisine.

Quand on découvre notre paquetage dans le bateau, c’est un peu Noël. Une fois sur la base, il vaut mieux mettre des signes distinctifs sur ses vêtements, car nous nous retrouvons un peu tous habillés pareil ! Mais rapidement chacun trouve ses préférences dans le paquetage : il y a les adeptes des chemises IPEV, ceux qui ne quittent pas leurs Sorrell, d’autres qui n’utilisent jamais leur VTN, quelques uns qui n’ont jamais mis les Bakou…

Il suffit ensuite d’empiler les couches, de porter une première couche qui soit respirante, de privilégier les sorties quand il n’y a pas trop de vent (c’est véritablement le vent qui nous refroidit), de ne pas tomber dans l’excès de trop se couvrir (sinon on transpire quand on marche, puis on a froid quand on s’arrête), et d’avoir en cas de besoin une chaufferette dans la poche. Pas évident au début de ne pas être « sur » ou « sous » habillé. Mais je vous assure que j’ai bien moins froid ici que lors de l’hiver que j’ai passé au Québec, ou lors de certaines journées de ski en montagne dans les Alpes !

C’est sûr qu’il y a bien des moments où en statique nous avons froid aux pieds, ou aux mains (par exemple lors des sorties pêches), mais comme le reste du corps est bien protégé, il suffit de se remettre à marcher, voire de courir quelques minutes, et ça va rapidement mieux. Nous finissons par être tellement habitués à nous habiller quand il fait -20 ou -25 que quand la température remonte à -15 ou -10, nous avons véritablement l’impression qu’il fait chaud dehors !

Face au froid, nous ne sommes pas tous égaux. Certains se contentent d’un t-shirt, d’un pull et d’une polaire quand il fait -25°C (véridique !), d’autres (comme moi) empilent parfois jusqu’à 6 couches pour être bien… Inutile d’essayer de s’endurcir et de faire le malin en sortant peu habillé : empiler les couches ne fait peut-être pas très « héros polaire » mais quand on est frileux, on est frileux, c’est comme ça !

On a beau ne pas souffrir du froid, les températures flirtent quand-même parfois avec les -30 … Il y a donc régulièrement des problèmes de givre dans le masque, l’intérieur de la cagoule qui gèle à cause de notre respiration (pas très agréable), certaines parties du visage qui commencent à blanchir et qu’il faut donc rapidement protéger (quitte à ne plus rien voir du tout) sous peine de gelures, des sandwichs qui gèlent dans le sac et des barres chocolatées qui deviennent dures comme de la pierre, ou encore des mains qui se refroidissent très vite dès qu’elles portent quelque chose… Mais ce sont des inconvénients tout relatifs ! Une fois qu’on les connait, on s’adapte, et par exemple on prend l’habitude de sauter le repas du midi en balade, les pauses pique-nique nous refroidissant trop…

D’autre part, l’intérieur des bâtiments est très bien (voire trop !) chauffé, nous n’avons donc jamais froid à l’intérieur. Il nous arrive même fréquemment de passer d’un bâtiment à l’autre en simple pull, quand il n’y a pas de vent, ou d’être en t-shirt à l’intérieur.

Alors ne soyez pas surpris si à mon retour je mets toujours autant de pulls et trouve qu’il fait froid en métropole… Encore un mythe qui s’effondre ?

Voilà deux tenues du paquetage lors d'une balade : je porte la combinaison bleue de biologiste, des moufles trois doigts, des Sorrell, une cagoule et un bonnet IPEV. A côté, Adrien notre chef Géophy porte un haut et bas de VTN, un bonnet IPEV, des moufles trois doigts et des Sorrell.

16 août 2010

Enfin les -30°C!

Le périmètre de banquise autorisée a encore une fois été étendu, et il nous est à nouveau possible de profiter de longues balades. Les jours sont de plus en plus longs, et le soleil monte chaque jour plus haut.
Comme c’est agréable!

Détail d’un berg rayé de brun

Le glacier de l’Astrolabe

Jusqu’à maintenant, les températures avaient été assez clémentes avec nous… Mais nous avons avec plaisir enfin passé le cap des -30°C ce samedi 14 août, avec un minimum enregistré à -32.5°C ! Ce jour là il y avait assez peu de vent, il faisait donc en apparence moins froid que d’autres jours (le minimum que nous ayons atteint cet hiver étant -59°C en température ressentie, avec l’effet du vent)… Nous avons arrosé cela comme il se doit le soir même, au champagne …

Côte de l’île un jour de catabatique

Traces de pas dans la tempête

Berg qui « fume » un jour de catabatique

Les poussins grandissent vite. Il ne reste pratiquement plus d’œufs non éclos. Nous pouvons observer des « duos ». Il s’agit de deux manchots ayant chacun un poussin (ou un œuf), qui paradent comme s’ils étaient en couple, et qui chantent l’un pour l’autre. On ne connait pas exactement l’origine de ce comportement. Parfois nous pouvons observer la même chose, mais entre trois manchots! Le résultat est vraiment esthétique…

Détail du ventre d’un empereur

Duo de manchots

« Trio » de manchots


Détail d’un manchot avançant avec son poussin dans sa poche incubatrice

Les empereurs nous ont fait la surprise au début du mois de venir en visite sur l’île. Habituellement ils restent cantonnés à la banquise, mais 4 audacieux sont partis à l’assaut de l’île des Pétrels… Le bruit d’un véhicule a fini par leur faire faire demi-tour, mais ils n’étaient pas si loin que ça du bâtiment du séjour!

Emplacement actuel de la manchotière

Les manchots montent parfois sur des glaçons

La manchotière devant un berg en forme de tête d’animal

Idée reçue n°10 : le continent Antarctique a été découvert il y a bien longtemps…

La présence de l’homme en antarctique est sans doute bien plus récente que ce que vous imaginez… En effet, si Aristote soupçonnait dès l’Antiquité l’existence d’un continent en équilibre avec l’Arctique, il a fallu quelques années avant que cette idée soit explorée… Au XVe siècle, les cartes indiquent néanmoins une très vaste « Terra incognita » bordant le sud de l’Océan Indien, à la latitude de 20°S.

En 1520, Magellan contourne le sud de l’Amérique, et aperçoit des terres glacées au sud. Les spécialistes de l’époque imaginent alors un continent   « Austral », qui irait de la Terre de Feu à l’Australie. Le premier navigateur à franchir le cercle polaire arctique est James Cook, en 1773, qui se retrouve arrêté par les glaces en janvier 1774. Sans le savoir, il est également le premier à faire le tour du continent. A son retour, il écrit :   « J’ai fait le tour de l’hémisphère austral dans une haute latitude, et je l’ai longé de manière à prouver, sans réplique, qu’il n’y a point de continent, à moins qu’il ne soit près du pôle et loin de portée des navigateurs ».

La première personne à avoir accosté sur le continent serait le chasseur de phoques américain John Davis, en 1821. En 1838, des navigateurs français à bord de l’Astrolabe (une corvette à voile), commandés par Jules Sébastien César Dumont d’Urville (déjà connu pour avoir découvert et ramené en France la Venus de Milo), se lancent à la recherche du pôle sud magnétique. Ils accostent le 21 janvier 1840 sur l’îlot de débarquement, à Pointe Géologie. Dumont d’Urville nomme cette zone du continent « Terre Adélie » en l’honneur de sa femme, Adèle.

Le premier hivernage est réalisé dans les glaces de la péninsule antarctique en 1897-98 par le Belgica, commandé par Adrien de Gerlache.
La première base sera installée en 1899 par le norvégien Borchgrevink à l’est de la Terre Adélie. Il y effectuera le premier hivernage à terre.

La conquête du pôle est lancée peu avant la première guerre mondiale… L’anglais Shackleton s’y intéresse de 1907 à 1910. Il abandonne à 179 km seulement du pôle, épuisé et à court de vivres. Il écrit à sa femme : « J’ai pensé que vous préféreriez un âne vivant à un lion mort ». En 1909, le norvégien Roald Amundsen (qui faisait partie de l’équipage du Belgica lors du premier hivernage), sur le point de partir à la conquête du pôle nord, apprend que celui-ci vient d’être atteint, deux explorateurs différents revendiquant la victoire. Il se rabat donc sur l’Antarctique.

Amundsen et quatre de ces compagnons atteignent ainsi le pôle sud géographique le 15 décembre 1911, après un trajet d’1.5 mois en ski et à l’aide de chiens de traineaux (54 chiens au départ, les 24 les moins performants furent sacrifiés en cours de route pour nourrir les chiens restants). Un mois plus tard, le 16 janvier 1912, le britannique Robert Falcon Scott atteint à son tour le pôle sud, y trouvant le drapeau norvégien de planté, une tente de secours ainsi qu’une lettre laissés par Amundsen. Partis avec des poneys, les britanniques ont dû rapidement tirer eux-mêmes leurs traineaux. Epuisés et démoralisés, Scott et ses cinq compagnons périront sur le trajet du retour.

Depuis la découverte de la Terre Adélie, qui constitue la TA1, les français s’étaient donc faits discrets sur le continent… En 1923, la souveraineté française est malgré tout proclamée en Terre Adélie. Cela fait alors plus de 80 ans que les français n’y ont pas mis les pieds…

En 1948-49, un navire français, le Commandant Charcot, effectue une mission de reconnaissance et se retrouve arrêté par le pack (c’est la TA2). Le bateau repart en 1949, un peu plus tôt dans la saison et équipé d’un petit hydravion pour repérer le passage dans les glaces. Il atteint cette fois-ci la Terre Adélie, et les expéditions polaires françaises (EPF), fondées par Paul-Emile Victor, y construisent la base de Port-Martin (nommée ainsi en hommage à Martin, décédé pendant le voyage). 11 personnes y hivernent en 1950 (TA3), puis 17 en 1951 (TA4).
Un incendie détruit les bâtiments en janvier 1952. La troisième expédition, qui vient de débarquer, s’installe alors sur l’île des Pétrels, et 7 personnes, sous la direction de Mario Marret, hivernent dans un petit bâtiment appelé « Base Marret » (TA5). Celle-ci sera fermée en janvier 1953. Les bâtiments ont été restaurés et la base est aujourd'hui en excellent état. Il est toujours émouvant d'y entrer et d'imaginer quelles furent les conditions de cet hivernage particulier...

La base Marret, en partie recouverte par la neige

Les expéditions cessent ensuite pendant 3 années, pour reprendre en 1956, dans le contexte de l’année géophysique internationale de 1957. En janvier 1956, la base de Dumont d’Urville est créée, conçue à l’origine pour 20 personnes et une occupation provisoire de 3 ans.

Pendant l’année géophysique internationale de 1957, 12 pays installent
48 stations en antarctique, principalement sur les côtes (seules la base russe de Vostok et la base américaine d’Amundsen-Scott sont alors situées sur l’inlandsis). Une seconde base française, la base Charcot, est également construite, à 300 km de la côté et 2400 m d’altitude. 3 scientifiques vont y hiverner pendant 2 ans, puis elle sera fermée fin 1959.

En 1959, le gouvernement français décide le maintien permanent de la base de Dumont d’Urville et la poursuite des travaux de recherche. La station est alors reconstruite et étendue. Depuis cette date, les missions se succèdent chaque année. La notre est la 60ème (TA60).

Voilà un résumé très succinct de l’histoire antarctique, vous voyez, c’est récent tout ça!

DDU et ses environs vus du sommet du mât ionosphérique

3 août 2010

Qui a parlé de s’ennuyer ?

Juillet nous a offert de belles journées ensoleillées. Quel bonheur !

Incroyable à quel point le retour du soleil peut faire du bien… Se laisser éblouir, fermer les yeux et imaginer ses rayons qui nous chauffent, le voir monter chaque jour plus haut… Je retrouve des sensations qui étaient enfouies très profondément, j’ai parfois l’impression d’être au printemps, quand les beaux jours reviennent… Bon je redescends vite sur terre en général, le soleil est là mais il fait -25°C, et demain il y a fort à parier qu’il y aura tant de nuages qu’on ne le verra plus :)…

Balade entre les bergs du glacier de l’Astrolabe

Bergs qui « fument », lors d’une journée à catabatique…

Voilà une belle journée ensoleillée pour faire une balade !

La banquise n’est pas si solide que ça, et notre périmètre de sortie a une nouvelle fois été réduit. Nous trépignons donc en attendant de pouvoir à nouveau profiter de longues balades…

Détail du glacier de l’Astrolabe

Nous avons pratiquement atteint les -30°C, avec -29.9°C le 1er août, j’ai bon espoir pour ce mois d’août :)! Toujours pas de gros coup de vent, c’est un peu décevant de ce côté-là… Il a neigé assez souvent en juillet, ce qui nous a permis de rattraper notre « retard » de congères (jusqu’à maintenant nous n’avions pas eu beaucoup de neige)!

L’île lors d’une journée à catabatique, l’atmosphère semble « trouble »

Les poussins empereurs continuent de naître, puis de grandir. Il y a de vraies différences de taille entre ceux nés il y a quelques semaines et ceux qui sortent tout juste de l’œuf ! Ils sont tellement beaux ! Je ne me lasse pas de les regarder…


La manchotière est située près de jolis bergs


Nous observons de temps en temps des rapts : certains manchots sans poussin essaient violemment de voler celui d’un voisin, ce qui dégénère en général en grosse bagarre, au détriment du poussin, qui se retrouve souvent abandonné.


Manchots dans le blizzard

A cette période de l’année, il se passe toujours quelque chose à la manchotière ! Entre les départs et les arrivées, les naissances, les nourrissages, les bagarres, les parades, les chants, les échanges d’œuf ou de poussin… Plusieurs pétrels géants sont également de retour sur l’archipel, et sont à l’affût des poussins abandonnés…


Un couple et son poussin

 

Parade

Idée reçue n°10 : à DDU, on s’ennuie…

Vous imaginez bien que celle-là, je ne peux pas la laisser passer. Avant le départ, combien de fois ai-je entendu « Tu te rends compte, plus d’un an en Antarctique, mais tu vas t’ennuyer… Il va falloir que tu en emmènes des livres !»…

Je n’y croyais pas trop, mais dans le doute, j’ai rempli mes malles de nombreux romans et manuels, ai emmené cerf-volant et balles de jonglage, partitions… J’avais également décidé de passer davantage de temps à écrire, de combler mes lacunes en histoire, de me remettre à l’harmonica et au piano, de commencer à faire du yoga… Rien que ça ! Certains anciens hivernants nous avaient pourtant prévenus, nous expliquant qu’ils avaient rempli leurs malles de choses leur permettant de passer le temps, mais qu’ils ne s’en étaient jamais servis… Oui, mais quand-même, on ne sait jamais… Résultat, j’ai à peine ouvert mes livres d’histoire, l’harmonica n’est pas encore sorti du tiroir, et je n’ai pas dépassé le chapitre 1 de mon livre de yoga. Eh bien oui, contrairement à ce que beaucoup pensent, il est bien difficile de s’ennuyer ici !

Vous l’aurez compris, en hiver mon programme de travail n’est pas trop chargé, et me laisse donc pas mal de temps libre… Alors comment est-il occupé ? En premier lieu, il y a les balades dehors. Je ne pensais pas pouvoir sortir autant, mais nos habits sont si chauds que l’on ne souffre absolument pas du froid, et beau temps ou non, pratiquement chaque jour je pars en balade. Pour un peu que l’on aime la photo, entre les animaux, les formations de glace, les aurores… il y a de quoi se faire plaisir. Un labo photo permet même de s’essayer au développement et au tirage noir et blanc.

Il est également toujours possible d’aider les autres hivernants, et d’apprendre ainsi beaucoup de choses dans des domaines très différents : relevés de balises sur le continent avec les glaciologues, cuisine avec le cuistot, confection de plis philatéliques avec le gérant postal, pêche avec le biologiste marin, pain et pâtisserie avec le boulanger, conduite d’engins avec le mécano…

La bibliothèque de la base contient des milliers de romans, beaux livres, revues (Géo, NGM, Trek magazine…) et BD, des classiques aux nouveautés… Moi qui ai du mal à me passer de livres, me voilà gâtée… Nous disposons également de près de 2000 films et reportages… De quoi enrichir sa connaissance du 7e art !

La salle de sport permet aux plus mordus de se défouler : rameur, vélo elliptique, vélo, banc de musculation, sac de frappe… J’avoue avoir eu du mal à m’y mettre, faire du sport en salle, définitivement, ça n’est pas mon truc…

Nous bénéficions d’une salle de musique plutôt bien équipée : piano électrique, guitares, batterie, percussions…

Enfin, de nombreux jeux sont présents sur base : des jeux vidéos, une Wii, un billard, un babyfoot, de nombreux jeux de société (le loup-garou et le Time’s up ont un franc succès), des jeux de cartes, un jeu de fléchettes…

D’autres loisirs peuvent également être pratiqués : animer certaines émissions de radio, faire de la vidéo, s’essayer au ski de fond ou au surf, bricoler, dessiner, peindre, apprendre ou perfectionner certaines langues (des cours de conversation en espagnol et en anglais ont été mis en place), préparer les soirées à thèmes et fabriquer des cadeaux pour les anniversaires…

Une fois n’est pas coutume, voici une photo prise à l’intérieur, dans le salon …

Les soirées sont souvent occupées par des projections de films, spectacles, concerts… Ou bien par des cours d’écologie, des jeux de société, des soirées poker ou tarot, des présentations ou soirées à thèmes…

N’oublions pas les heures passées à la manchotière à observer les empereurs, les glissades dans les congères, les discussions autour d’un thé, les correspondances avec des écoles…

Bref, les possibilités sont quasiment infinies ! En ce qui me concerne je me suis un peu remise au piano, converse en espagnol et anglais, joue quotidiennement au billard et profite surtout des balades, en faisant de la photo.

Avec tout ça, le temps libre est bien occupé, et croyez-le ou non, je trouve bien souvent les journées trop courtes !

Et une petite photo d’aurore pour finir !